Décryptage des actualités législatives Projet de loi ASAP : les dispositions concernant l'énergie

[Actualisation de l’article à la suite de la Commission mixte paritaire qui a proposé une rédaction commune]

Cet article recense les dispositions qui concernent directement le secteur de l’énergie dans le cadre du projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique actuellement discuté au Parlement et dont la première lecture s’est achevée le 6 octobre. En raison de divergences entre les deux chambres, une commission mixte paritaire a été convoquée le 7 octobre. Cette commission est parvenue à adopter un texte commun le 21 octobre 2020.

Au-delà de ces dispositions, d’autres articles non recensées ici peuvent également avoir un impact indirect sur le secteur de l’énergie. Il s’agira notamment des dispositions visant à simplifier le code de l’environnement et la réglementation ICPE.

 

Article 25 bis F : Simplification des procédures permettant d’accélérer le développement des énergies renouvelables électriques terrestres

Cet article met en place une série de mesures de simplification qui doivent permettre d’accélérer le développement des énergies renouvelables :

  • Il modifie les articles L. 2253-1, L. 3231-6 et L. 4211-1 du code général des collectivités territoriales pour étendre à sept ans la durée des avances en compte courant que les collectivités territoriales et les groupements de communes peuvent consentir aux sociétés de production d’énergie renouvelable dont ils sont actionnaires. Cette durée est renouvelable une fois. Pour que le dispositif puisse être utilisé, il faut que l’énergie produite par les installations bénéficie de l’obligation d’achat à un tarif garanti par l’État ou d’un complément de rémunération.
  • Il modifie l’article L. 2122-1-3-1 du code général de la propriété des personnes publiques pour permettre d’exclure de la procédure de mise en concurrence prévue par cet article les projets de production d’électricité à partir d’énergie renouvelable qui bénéficient d’un soutien public obtenu au terme de la procédure de mise en concurrence prévue à l’article L. 311‑10 du code de l’énergie. Cette réforme évite de mettre en place deux procédures de mise en concurrence successives, qui sont génératrices de délais.
  • Enfin, il modifie l’article L. 121-39-1 du code de l’urbanisme pour permettre d’étendre aux installations d’énergie renouvelable les dérogations à la loi « littoral » prévues en Guyane pour les constructions ou installations liées aux activités de stockage, de traitement ou de valorisation des déchets incompatibles avec le voisinage des zones habitées. Leur construction sera permise avec l’accord de l’autorité administrative, après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. Cette modification est rendue nécessaire par le fait que 15 des 22 communes de la Guyane sont soumises aux dispositions de la loi « littoral », alors que certaines ont des surfaces géographiques très importantes.

Actualisation : La proposition commune de rédaction de la Commission mixte paritaire a eu pour objet de consolider les simplifications apportées par le présent article aux projets d’énergies renouvelables en les étendant aux installations de biogaz et en les rendant applicables en Corse, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion et aux îles Wallis-et-Futuna.

 

Article 25 bis : information des maires sur les projets d’installations éoliennes

Les tableaux annexés aux articles R. 511-9 et R. 122-2 du code de l’environnement prévoient que les installations terrestres de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent et regroupant un ou plusieurs aérogénérateurs (éoliennes) sont soumises au régime de l’autorisation environnementale :

  • lorsqu’elles comprennent au moins un aérogénérateur dont la hauteur est supérieure ou égale à 50 mètres ;
  • lorsque les aérogénérateurs ont une hauteur comprise entre 12 et 50 mètres et que la puissance totale installée est supérieure ou égale à 20 mégawattheures.

 

Dans le cadre de cette procédure, les communes concernées sont informées car le préfet est tenu de recueillir leur avis dès le début de la phase d’enquête publique (article R. 181-38 du cde de l’environnement).

Jugeant que les maires étaient informés trop tard des projets éoliens, les parlementaires ont décidé d’insérer dans le code de l’environnement un article L. 181‑28‑2 qui prévoit que le porteur d’un projet d’installation de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent doit adresser au maire de la commune concernée et des communes limitrophes, un mois au moins avant le dépôt de la demande d’autorisation environnementale, le résumé non technique de l’étude, document obligatoire dans le cadre d’une demande d’autorisation environnementale pour un parc éolien.

 

Article 25 ter : simplification des procédures relatives à l’éolien en mer

Cet article modifie l’article L. 121‑8‑1 du code de l’environnement pour réduire les délais avant l’attribution des projets. Il ouvre la possibilité, pour le ministre chargé de l’énergie, de consulter le public, par l’entremise de la Commission nationale du débat public, sur l’identification de plusieurs zones potentielles d’implantation de projets de parcs éoliens en mer, afin de pouvoir lancer plusieurs procédures de mise en concurrence sur la base d’une participation du public commune. Il permet aussi au ministre chargé de l’énergie de réaliser les étapes de la procédure de mise en concurrence (notamment la sélection des candidats admis à participer au dialogue concurrentiel) parallèlement au déroulement du processus de participation du public. Le ministre chargé de l’énergie doit prendre en compte les résultats de la participation du public pour prendre des décisions sur les caractéristiques des parcs éoliens, y compris pour fixer leur localisation exacte.

Cet article insère aussi un article L. 311-13 dans le code de justice administrative pour réduire les délais dus aux recours exercés à l’encontre des projets en confiant la compétence en premier et dernier ressort pour connaitre des litiges relatifs à l’éolien en mer au Conseil d’État.

Actualisation : La rédaction issue de la Commission mixte paritaire précise explicitement que la phase de dialogue concurrentiel de la ou des procédures de mise en concurrence ne peut démarrer avant la communication du bilan de la participation du public, et que c’est après communication de ce bilan que le ministre chargé de l’énergie décide du principe et des conditions de la poursuite de la procédure de mise en concurrence.

 

Article 12 bis : Allongement de trois à cinq ans de la durée à l’issue de laquelle est révisé le Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs

L’article L. 542-1-2 du code de l’environnement prévoit actuellement que le Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR), qui détermine les orientations stratégiques et les principaux objectifs relatifs à la gestion des matières et des déchets radioactifs, doit être révisé tous les trois ans. En application de l’article L. 542-12 du code précité, la révision de l’inventaire national des matières et des déchets radioactifs réalisé par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs observe également un rythme triennal. Le PNGMDR doit intégrer l’impact des orientations de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) relative à ces enjeux. Contrairement à la périodicité triennale susmentionnée, la PPE fait l’objet d’une révision quinquennale sur le fondement de l’article L. 141-4 du code de l’énergie.

L’article 12 bis modifie les articles L. 542-1-2 et L. 542-12 du code de l’environnement afin de rendre identique la durée de révision de la PNGMDR et de l’inventaire national des matières et des déchets radioactifs à celle de la PPE, soit cinq ans.

 

Article 28 : Application du statut d’entreprise fortement consommatrice d’électricité à un ensemble de sites de consommation d’une même plateforme industrielle

 

Depuis 2016, l’article L. 351-1 du code de l’énergie permet aux entreprises dont tout ou partie de leurs sites a une consommation élevée d’électricité de bénéficier de conditions particulières d’approvisionnement en électricité quand elles répondent à différents critères définis réglementairement. Ceux-ci portent sur le rapport entre la quantité d’électricité consommée et la valeur ajoutée produite par l’entreprise ou le site et sur son degré d’exposition à la concurrence internationale ainsi que, éventuellement, sur le volume annuel de consommation d’électricité et les procédés industriels mis en œuvre. Les articles D. 351-1 à D. 351-3 du code de l’énergie reconnaissent ainsi comme éligibles au statut de site fortement consommateur d’électricité :

  • les sites dits électro-intensifs qui consomment plus de 2,5 KWh par euro de valeur ajoutée et plus de 50 GWh au total par an et qui ont une exposition à la concurrence internationale supérieure à 4 % ;
  • et les sites dits hyper électro-intensifs qui consomment plus de 6 KWh par euro de valeur ajoutée et ont une exposition supérieure à 25 %.

Pour bénéficier du régime défini à l’article L. 351-1, ces entreprises et sites doivent mettre en œuvre une politique de performance énergétique, c’est-à-dire – comme le précise le dernier alinéa de cet article – disposer d’un système de management de l’énergie et atteindre en cinq ans des objectifs de performance énergétique définis par voie réglementaire pour chaque catégorie. À défaut, l’autorité administrative peut retirer le bénéfice du statut d’entreprise ou de site fortement consommateur d’électricité et prononcer une sanction pécuniaire.

Le principal avantage découlant de la reconnaissance de ce statut est une réduction sur le tarif d’utilisation des réseaux publics de transport d’électricité, dit « TURPE », lorsque ces sites fortement consommateurs d’électricité « présentent un profil de consommation prévisible et stable ou anticyclique » et qu’ils sont directement raccordés à ces réseaux (article L. 341-4-2 du code de l’énergie). Cette réduction varie de 45 % à 90 % selon les profils et leurs sous-catégories (annexe de l’article D. 341‑9 du code de l’énergie). Un profil est reconnu stable au-delà de 10 GWh d’énergie annuelle soutirée sur le réseau et 7 000 heures d’utilisation du réseau ; le profil anticyclique suppose un niveau d’énergie soutirée supérieur à 20 GWh et au moins 44 % d’utilisation en heures creuses. Enfin, est considéré comme grand consommateur le site qui utilise plus de 500 GWh par an ; il est alors éligible à une réduction du TURPE si son utilisation se situe entre 40 et 44 % en heures creuses.

Toutefois, la reconnaissance du statut d’entreprise ou de site fortement consommateur d’électricité et les taux de réduction de TURPE plus généreux qui peuvent en découler ne s’appliquent qu’au sein d’une même entreprise : un site peut bénéficier du statut parce que son entreprise a fait reconnaître l’éligibilité de tout ou partie de ses sites et justifie chaque année en remplir les critères par une attestation remise au représentant de l’État dans la région. Deux sites appartenant directement ou indirectement à 50 % au moins au même actionnaire ultime, qui sont alimentés par le même poste d’entrée géré par le gestionnaire du réseau public de distribution, peuvent être considérés comme un unique site de consommation et atteindre ainsi les seuils d’éligibilité à la réduction de TURPE.

En revanche, en l’état actuel du droit, des sites appartenant à des exploitants industriels différents, situés au même endroit et utilisant des moyens communs d’alimentation en électricité ne peuvent y prétendre s’ils n’en remplissent pas individuellement les conditions et ce, même si, ensemble, ils dépassent les seuils nécessaires.

Aussi l’article 28 du projet de loi propose-t-il d’étendre le statut de site fortement consommateur d’électricité, mais également le bénéfice de la réduction de TURPE, aux ensembles de sites situés au sein d’une même plateforme industrielle. Issue de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (dite loi « PACTE »), la notion de plateforme industrielle est définie à l’article L. 515-48 du code de l’environnement : elle correspond à un regroupement, sur un territoire délimité et homogène, d’installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) qui mutualisent certains des biens et services nécessaires à leur fonctionnement, comme leur fourniture d’électricité. L’inscription d’un regroupement de sites comme plateforme industrielle autorise l’adaptation de la règlementation à ses spécificités. Elle est subordonnée à la conclusion, entre les ICPE souhaitant se regrouper, d’un contrat de plateforme qui désigne notamment un gestionnaire de plateforme, responsable des gestions mutualisées. Le dispositif étant très récent, aucune plateforme n’a encore été inscrite. Mais l’accès de ces regroupements aux avantages prévus aux articles L. 351-1 et L. 341-4-2 du code de l’énergie pourrait accélérer leur constitution en assurant aux ICPE de la plateforme un prix de l’énergie cohérent entre elles mais aussi comparable au prix appliqué à un ensemble similaire de sites relevant d’une même entreprise. Cela représenterait un allègement bienvenu des charges des entreprises concernées, grandes consommatrices d’électricité, tout en encourageant la concentration des sites de production industrielle, limitant ainsi l’artificialisation des sols.

Or, les conditions actuellement définies à l’article L. 351-1 ne permettent pas de bénéficier de ces régimes. L’article 28 propose donc de considérer les ICPE situées dans une même plateforme industrielle comme formant un seul site fortement consommateur d’électricité sous réserve :

  • qu’elles soient toutes raccordées au réseau public d’électricité ;
  • que, parmi les critères normalement exigés par l’article L. 351-1, l’ensemble des ICPE atteigne le volume annuel de consommation d’électricité éligible et remplisse les contreparties en termes de performance énergétique ;
  • qu’elles désignent enfin une ou plusieurs entités responsables vis-à-vis de l’autorité administrative du respect des précédentes conditions.

Il est à noter que :

  • la demande de reconnaissance du statut de site fortement consommateur d’électricité découle d’un accord de toutes les entreprises concernées, et non de l’initiative de l’une d’entre elles ;
  • font également l’objet d’un accord entre les entreprises de la plateforme la répartition entre les sites du bénéfice de la réduction de TURPE, qui découlera du nouveau statut, ainsi que le partage des responsabilités en cas de non‑respect des contreparties (mise en œuvre d’un management de l’énergie et atteinte des objectifs de performance énergétique), qui peut entraîner le retrait du statut, voire des sanctions financières. Au demeurant, cet accord peut constituer un des chapitres du contrat de plateforme ;
  • pour autant, la mise en œuvre des contreparties pourra incomber à chaque entreprise individuellement, sans imposer un seul et même système. Il s’agit de respecter de potentielles contraintes de confidentialité et plus globalement de conserver la possibilité d’adapter les stratégies de gestion de l’énergie à la diversité des organisations des plateformes ;
  • L’article renvoie à un décret en Conseil d’État la définition des modalités de mise en œuvre du dispositif concernant les plateformes industrielles.

Selon l’étude d’impact du projet de loi, l’impact en volume resterait limité, avec de moindres recettes d’environ 4 millions d’euros par plateforme et par an, sur un total de TURPE de 13,5 milliards d’euros en 2017.

Le Sénat a relevé la question de la compatibilité de ces réductions de TURPE avec le droit européen sur les aides d’État. Le Gouvernement a reconnu que le dispositif fait l’objet de discussions avec la Commission européenne, mais il estime que le nouveau régime des plateformes industrielles est moins susceptible de poser de problème parce qu’il se fonde sur le seul critère du volume annuel de consommation d’électricité – conformément à l’avis du Conseil d’État. Cet article fera l’objet d’une notification à la Commission européenne au titre des aides d’Etat.

 

Article 28 bis A : Globalisation du plafond maximal des réductions de TURPE applicables aux sites fortement consommateurs d’électricité

Le dispositif modulant les tarifs d’utilisation des réseaux publics de transport d’électricité (TURPE) applicables aux sites fortement consommateurs d’électricité prévoit que ces réductions sont plafonnées « pour concourir à la cohésion sociale et préserver l’intérêt des consommateurs ». L’article L. 341‑4‑2 du code de l’énergie définit ainsi les taux maximaux (variant de 20 à 90 %) applicables aux grandes catégories de sites, déclinés ensuite par décret. Il distingue en particulier les « catégories définies [à l’]article L. 351‑1 » – à savoir les sites électro-intensifs et hyper électro‑intensifs – des « autres sites de consommation ».

Ces derniers sont aussi de grands consommateurs d’électricité qui présentent des profils « stables et anti‑cycliques » mais ne répondent pas aux critères d’électro‑intensivité prévus par l’article L. 351-1 du code de l’énergie. Leurs caractéristiques sont précisées à l’article D. 341-9 du même code. Ils sont une cinquantaine sur les 220 bénéficiaires des réductions de TURPE, toutes catégories confondues.

Le dispositif de réduction de TURPE fait actuellement l’objet d’une enquête de la Commission européenne au titre des règles relatives aux aides d’État aux entreprises. Pour prévenir ses critiques, le Gouvernement envisage de ne plus faire varier les taux de réduction selon les différentes catégories de sites, mais en fonction seulement des caractéristiques de consommation et d’utilisation du réseau. Pour préserver la possibilité d’accorder des réductions jusqu’à un taux de 90 %, l’article 28 bis A réunit ces ensembles de sites sous le plafond unique de 90 %. Dans le détail, les différents plafonds possibles seront précisés par décret, en veillant au respect des règles européennes.

Actualisation : la proposition commune de rédaction de la Commission mixte paritaire a eu pour objet de permettre le rapprochement des taux plafond de réduction du tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité (TURPE), tout en maintenant une référence aux catégories actuelles de bénéficiaires.

 

Article 28 ter : Travaux de raccordement à la fibre optique simultanés aux travaux de raccordement électrique, aux frais du producteur

Cet article autorise à coupler les travaux d’installation des réseaux de télécommunications en fibre optique avec ceux réalisés pour raccorder une installation de production (d’électricité) au réseau public de distribution d’électricité. Le dispositif créé prévoit qu’à la demande et aux seuls frais d’un producteur (d’électricité), le gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité concerné pourrait réaliser ou faire réaliser les travaux de pose de l’installation de transport des communications électroniques – nécessaires à ce même producteur pour piloter et surveiller son installation de production et donc optimiser son fonctionnement – en même temps qu’il procède au raccordement de son site de production.

Le gestionnaire du réseau de distribution remet ensuite la gestion et l’entretien du nouveau segment de ligne en fibre optique à l’exploitant du réseau de lignes à très haut débit en fibre optique déployé dans la zone de l’unité de production. Cet exploitant ayant le devoir d’en laisser l’accès à tout fournisseur de services de télécommunications, le producteur usager reste libre de choisir son opérateur.

 

Article 28 quater : Extension de l’utilisation des chèques énergie aux hébergements pour personnes âgées

Le chèque énergie est un titre spécial de paiement permettant aux ménages modestes d’acquitter tout ou partie du montant des dépenses d’énergie de leur logement. Il leur est distribué, au regard de leurs ressources, par l’Agence de services et de paiement mentionnée à l’article L. 313-1 du code rural et de la pêche maritime, qui en assure ensuite le remboursement aux personnes et organismes autorisés à le recevoir.

L’article L. 124-1 du code de l’énergie précise ainsi que les fournisseurs et les distributeurs d’énergie mais aussi les gestionnaires des logements-foyers ayant conclus avec l’État une convention d’aide personnalisée au logement sont tenus d’accepter ce mode de règlement. Dans le cas des logements-foyers, où les charges d’énergie sont collectives et intégrées à la dépense de logement, le résident peut utiliser son chèque énergie en paiement de la redevance due au gestionnaire du foyer.

De nombreux résidents en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), établissements d’hébergement pour personnes âgées (EHPA) et unités de soins de longue durée (USLD) reçoivent un chèque énergie ; mais ils ne peuvent l’utiliser parce que leur établissement n’entre pas dans les catégories de personnes morales pouvant l’accepter et qu’ils ne disposent pas non plus de facture d’énergie individuelle, leurs charges étant comprises dans le tarif de l’établissement.

L’article 28 quater ouvre la qualité d’acceptants du chèque énergie à ces trois catégories d’établissements afin que leurs résidents bénéficiaires de la prestation puissent l’utiliser effectivement.

Actualisation : La proposition commune de rédaction de la Commission mixte paritaire a eu pour objet de consolider la possibilité pour les personnes âgées résidant dans un établissement médico-social d’utiliser leur chèque énergie pour régler certaines dépenses, en précisant que le règlement intervient à l’initiative de la personne âgée, que le gestionnaire de l’établissement est tenu de l’accepter, et que l’établissement en question peut faire, ou non, l’objet d’un conventionnement au titre de l’aide personnalisée au logement (APL).

 

Article 28 quinquies : Renforcement du dispositif de sécurisation des canalisations de gaz

Transfert de propriété des colonnes montantes

S’inspirant du régime applicable aux colonnes montantes d’électricité, le I de l’article 28 quinquies crée une nouvelle section 3 au chapitre II du titre III du livre IV du code de l’énergie qui détermine le nouveau régime de propriété des canalisations de gaz situées entre le réseau public de distribution et l’amont du compteur (également appelées conduites d’immeubles ou conduites montantes). Il précise que les canalisations de gaz créées à compter de la publication de la future loi appartiendront aux réseaux publics de distribution de gaz – soit en dernière analyse, aux collectivités locales propriétaires de ces réseaux. Jusqu’au 31 décembre 2022, les conduites d’immeubles existantes qui ne sont pas déjà intégrées à la concession d’un réseau public sont présumées appartenir aux copropriétaires des immeubles où elles se trouvent. Dans ce délai, ceux-ci peuvent choisir de :

  • transférer définitivement les canalisations au réseau public de distribution de gaz. Le transfert de propriété s’opère alors dès la notification de leur décision, à titre gratuit et sans contrepartie pour le gestionnaire de réseau ;
  • ou revendiquer la propriété de ces canalisations.

À défaut de cette démarche, la propriété des canalisations sera automatiquement transférée au réseau public le 1er janvier 2023, toujours à titre gratuit et sans contrepartie pour son gestionnaire. Après cette date, les copropriétaires d’immeubles ayant revendiqué la propriété des canalisations pourront encore changer d’avis en les transférant au réseau public mais sous réserve de leur bon état de fonctionnement.

Sont également précisées des conditions particulières du transfert des parties de canalisation se situant à l’intérieur de la partie privative du logement jusqu’au dispositif de comptage, lorsque ce dernier est à l’intérieur du logement, aussi appelés « bouts parisiens » bien qu’on en trouve parfois ailleurs qu’à Paris.

Le II, non codifié, indique enfin que, hors clauses contraires de leurs contrats de concession, les entreprises concessionnaires du réseau public de distribution de gaz ne sont pas tenues de constituer des provisions financières pour anticiper le renouvellement des canalisations d’immeubles ainsi transférées. Le statut des conduites d’immeubles est en effet disparate sur l’ensemble du territoire national. Il reste un certain nombre d’installations encore privatives, dont l’entretien – et son coût – incombe alors aux copropriétaires de l’immeuble où elles se situent, voire au propriétaire du logement jusqu’où elles pénètrent. L’objectif du transfert de propriété est de confier la surveillance et l’entretien de ces ouvrages au distributeur qui a l’expertise et les outils pour le faire. Un meilleur contrôle est une meilleure garantie pour la sécurité des réseaux de gaz. La surveillance et l’entretien des installations de gaz intérieures, situées en aval du compteur, restent quant à eux à la charge du propriétaire des locaux.

 

L’attribution de la prise en charge des travaux de réparation des réseaux de distribution

L’article L. 554-1 du code de l’environnement impose aux entreprises exécutant des travaux à proximité de réseaux souterrains, aériens ou subaquatiques de transport ou de distribution (de gaz mais aussi d’électricité, eau, télécommunications, etc.), au responsable du projet de travaux et aux exploitants de ces ouvrages de mettre en œuvre les mesures techniques et organisationnelles nécessaires pour éviter de porter atteinte à leur intégrité, sécurité ou continuité de fonctionnement, à l’environnement, à la sécurité des travailleurs et du voisinage ou à la vie économique.

Le 1° du III de l’article 28 quinquies clarifie les modalités de prise en charge de la réparation desdits ouvrages en cas de dommage survenu au cours de ces chantiers. Il exonère ainsi du coût des travaux de réparation (et de l’obligation de réaliser cette réparation pour celui qui exécute le chantier) le responsable de projet et l’exécutant des travaux si :

  • l’endommagement est accidentel ;
  • il s’est produit au-delà de la zone dans laquelle des précautions particulières doivent être mises en place à l’occasion des travaux. Celle-ci est définie à partir des données de localisation fournies par l’exploitant ou des résultats des investigations de localisation des ouvrages menées en amont des travaux lorsque la position des ouvrages n’est pas connue avec une précision suffisante, le cas échéant, et selon une distance fixée par arrêté du ministre chargé de la sécurité des réseaux de transport et de distribution. On parle de zone d’incertitudes ;
  • et il n’y a pas d’autre indice de la présence d’un ouvrage à l’endroit de l’endommagement.

Il s’agit de ne pas faire porter au responsable de projet et à l’exécutant des travaux plus que leur responsabilité de mettre en œuvre des techniques « douces » dans les zones d’incertitudes indiquées par les exploitants des ouvrages – et pour le responsable de projet de communiquer les résultats des investigations de localisation des ouvrages. Ils n’ont pas à supporter le coût des réparations des réseaux si, faute de réponses précises des exploitants à leurs déclaration d’intention de travaux et déclaration de travaux, la localisation réelle des ouvrages se trouve en dehors des zones d’incertitudes. La responsabilité du responsable de projet et de l’exécutant reste entière dans les autres cas.

 

L’élargissement des cas justifiant l’interruption de la livraison de gaz

L’article L. 554-10 du code de l’environnement autorise l’exploitant d’une canalisation de transport ou de distribution de gaz à interrompre la livraison du gaz à tout consommateur final qui y est raccordé s’il s’oppose à un contrôle réglementaire de ses appareils ou équipements à gaz (ou aux opérations de contrôle, d’adaptation et de réglage nécessaires en cas de changement de nature du gaz acheminé). L’exploitant interrompt la livraison du gaz lorsqu’il a connaissance d’un danger grave et immédiat pour la sécurité des personnes et des biens que présentent ces appareils et équipements. Le 2° du III de l’article 28 quinquies ajoute de nouvelles situations : en cas d’opposition à une opération réglementaire de surveillance ou de maintenance d’une canalisation de gaz de la part du consommateur final, mais aussi du propriétaire, de son mandataire ou de l’occupant d’un local ou terrain traversé par cette canalisation. Le danger grave et immédiat est alors celui que présente la canalisation. Cet élargissement vise à imposer l’accès à toutes les parties privées traversées par les canalisations d’alimentation en gaz afin que les contrôles réglementaires et les opérations d’entretien nécessaires à la sécurité des installations soient exhaustifs et s’effectuent dans de bonnes conditions.

 

La réintroduction des sanctions des atteintes au bon fonctionnement des canalisations de gaz

Enfin, l’article 28 quinquies a réintroduit la possibilité de sanctionner les actes de malveillance portant atteinte au fonctionnement des ouvrages et installations de distribution ou de transport de gaz (ou d’hydrocarbures liquides ou liquéfiés), qui avait été supprimée par erreur du code de l’énergie par l’ordonnance n° 2016‑282 du 10 mars 2016 relative à la sécurité des ouvrages de transport et de distribution. Régulièrement confrontés à ce genre de comportement qui peut avoir des conséquences graves, les opérateurs de distribution et de transport de gaz ne disposent plus aujourd’hui de recours pénal, ce qui crée un flou préjudiciable à la sécurité des ouvrages. Ces actes volontaires pourront désormais être punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende (article 322-1 du code pénal), voire de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende en cas de circonstances aggravantes (article 322-3 du même code).

Actualisation : La proposition commune de rédaction de la Commission mixte paritaire a pour objet de sécuriser les responsabilités incombant au gestionnaire du réseau de distribution de gaz, en précisant que le transfert des canalisations situées à l’intérieur des domiciles intervient à titre gratuit et sans contrepartie pour ce gestionnaire, tout comme celui des canalisations situées à l’extérieur des domiciles ; que le coût pris en charge dans le tarif d’acheminement du gaz porte sur la visite et les opérations nécessaires au transfert des canalisations situées à l’intérieur du domicile ; et que les sanctions pénales prévues en cas de dégradation du réseau de gaz s’étendent aux installations de biogaz.

 

Article 28 sexies : augmentation du taux de réfaction pour la production biométhane

Cet article a pour objectif d’accélérer et de simplifier le développement des petites unités de méthanisation agricole, en levant un frein législatif, sans coût supplémentaire pour les finances publiques. Les prix des raccordements des installations d’énergies renouvelables aux réseaux peuvent être un frein à leur développement. C’est pourquoi le législateur a prévu qu’une partie de ces coûts soient intégrés au prix de l’énergie. Appelé taux de réfaction, il correspond à la partie du prix d’un raccordement qui ne sera pas facturée par le gestionnaire du réseau au demandeur du raccordement mais sera couvert par le tarif d’utilisation des réseaux publics facturé, lui, à l’ensemble des consommateurs finals de gaz naturel.

S’agissant du biométhane, le Gouvernement a décidé de proposer un nouveau tarif comprenant une baisse immédiate pouvant aller jusqu’à près de 15%.

Afin de lisser une partie de cette baisse sur les porteurs de projet, cet article prévoit une augmentation possible du taux de réfaction, de 40% à 60%, qui permettrait le financement par l’ensemble des consommateurs de gaz d’une partie du coût lié au verdissement de cette énergie. L’impact sur le tarif d’acheminement du gaz est estimé à moins de 0,1% pour le consommateur final tout en allégeant le coût de raccordement des installations de gaz renouvelable.

Actualisation : La proposition commune de rédaction de la Commission mixte paritaire a eu pour objet d’appliquer un même régime juridique en matière d’installations de biogaz aux réseaux de transport et de distribution de gaz.

L’Equipe d’Energie en lumière

Le 27 octobre 2020